Notre Hafenmeister Baldur nous raconte qu’il a été pendant une trentaine d’année policier volontaire à Berlin. Lorsque le mur fut construit en 1961, la municipalité en accord avec les Forces Alliées créèrent un contingent de 4000 policiers volontaires. Pressé par la crainte d’une invasion de la DDR, le recrutement se fit sur la base d’une bonne présentation, de solides garçons aux cheveux coupés normalement et dont l’haleine ne sentait pas l’alcool.
Baldur fut accepté, on lui assigna un point de rassemblement où il reçut un uniforme à sa taille, un casque, une arme à point et un fusil mitrailleur. En cas d’alerte il devait s’y rendre et attendre les instructions.
Ses papiers d’identité mentionnèrent son appartenance à ce cadre et l’autorité de donner des ordres.
Après la chute du mur, le bataillon fut dissout.
Lorsqu’il entend notre intention d’aller voir une exposition à Berlin-Kreuzberg, notre ancien policier fait la moue et dit: ‘Neu Istambul’. ‘On ne comprend personne dans ce coin et il ne faut surtout pas sortir la nuit’. ‘De mon temps, nous avions des policiers Turcs dans notre section car il était impossible pour nous Allemands de travailler dans cette partie de la ville’. ‘Les magasins sont Turc, les cafés sont Turc, les marchés ouverts sont Turc et on n’y parle que Turc’.
Baldur n’approuvait pas notre projet du jour.
Un peu avant midi nous nous pointons à la porte latérale du Dôme pour aller suivre le service religieux organisé tous les jours dans la cathédrale à 12:00 et à 18:00.
Nous ne sommes pas croyants mais intéressés.
Le service est court et simple. Une jeune étudiante en théologie évangélique en robe noire à col blanc salue les visiteurs et annonce le programme. Un morceau de Bach sur la grande orgue, un sermon sur l’importance d’être bienheureux, un hymne, le notre père et un autre morceau de Jean-Sébastien pour clôturer la cérémonie, le tout en 15 minutes.
C’est bien envoyé, reposant et en prime, l’entrée au Dôme est gratuit pour les intéressés.
Guillaume II fut le commanditaire de cette imposante cathédrale, de style haute renaissance italienne, elle fut terminée en 1904; les Hohenzollern y reposent.
L’édifice est la réponse protestante à la cathédrale St-Pierre de Rome. Les plans sont de C.Raschdorff et la loge impériale de Friedrich Schinkel.
Assis au centre, sur les bancs sous la coupole, entourés des colonnes et des dorures, écrasés par la présence de l’immense orgue, on se sent tout petit, le but des constructeurs est atteint.
Nous prenons le U2 vers la Potsdammerstrasse 91, où selon les instructions du petit livre publié à l’occasion de la nuit des musées il y a deux semaines, doit se situer le MocTA, le ‘Museum of contemporary Trash Art’.
Le préposé à l’entrée de la galerie ‘Hardhitta Gallery’ nous informe qu’effectivement pendant la nuit des musées, le MocTA y a exposé quelques oeuvres, zut.
Aujourd’hui la galerie expose une série de photos de Gregory Bojorquez, un photographe natif de LA. Les photos, pour la majorité en noir et blanc, sont prises dans les rues de sa ville. C’est un témoignage brut et confrontant d’une partie de cette mégapole où la violence et la gratuité de la vie est une réalité journalière.
Au fond de la même cour intérieure, la galerie ‘Freies Museum Berlin’ expose des concepts photographiques Polonais. Selon les dires de la guide, dans les années 70′, la Pologne et la France étaient les pays précurseurs de l’art conceptuel photographique, on apprend tous les jours quelque chose de nouveau.
Sur le chemin du retour vers le S7, nous flânons dans les rue du Kreuzberg. Le long de la Crellestrasse nous traversons un bouillonnant marché Turc, les marchants font l’article à voix haute.
J’achète un épis de maïs chaud, que je grignote avec délectation. Les filles ont troqué la bourka pour des mini-jupes et l’atmosphère est bon enfant.
Nous aimons beaucoup la vie trépidante de ce quartier de Berlin, les rues sont larges, on y voit de belles façades décorées de sculptures en stuc, les bistros ont leurs terrasses sur les trottoirs, Baldur doit confondre Kreuzberg avec LA.
– Publié sur mon iPad