Voltaire vécut pendant de nombreuses années au Palais et il eut avec le roi des relations à la fois de grande amitié, de maître à élève et d’égal à égal sur le plan intellectuel jusqu’au jour où le roi vieillissant ne toléra plus l’esprit critique du philosophe français et contraignit ce dernier à prendre la fuite.
L’anecdote veut que pour montrer l’étendue de son pouvoir, Frédéric II le fit arrêter pendant quelques jours, sur le chemin de son retour vers la France.
Vingt ans plus tard, le roi finança une sculpture d’un Voltaire vieux et anorexique, une plume à la main et simplement vêtu d’une feuille de papier cachant son sexe. Ladite sculpture est exposé à côté de la statue de sa soeur Wilhelmine, dont l’original se trouve dans le pavillon de l’amitié, que nous avons admiré hier dans le parc.
Dans une vitrine de la chambre où se trouvent ces oeuvres, on peut lire un manuscrit de Voltaire qui remercie le roi pour son geste d’amitié.
Les curateurs soulignent ainsi le lien puissant qu’avait Frédéric pour sa soeur ainée et pour le philosophe.
Le marquis d’Argens, un autre favori du roi avait son appartement dans le Neues Palais. Le monarque toujours moqueur, l’avait fait décoré avec des tableau ‘à la Watteau’, sachant que le philosophe français détestait ce peintre. Pourtant la considération était présente car après sa mort Frédéric fit élever à Aix-en-Provence un mausolée à sa mémoire.
Sous le sobriquet affectueux de ‘Der Alte Fritz’, le roi traverse l’histoire comme un monarque ascète, rien n’est moins vrai.
Il n’aimait pas les femmes, son épouse la reine Elisabeth Christine n’a jamais mis les pieds au Neue Palais, Frédéric n’avait pas prévu d’appartement pour elle.
On le dit plutôt asexué qu’homosexuel, mais il aimait s’entourer d’hommes beaux et érudits et chaque jour, il prenait en bonne compagnie un long moment pour un repas élaboré, comportant toujours des fruits et des légumes frais qu’il faisait venir de loin à grand prix, la cerise était sa délicatesse favorite. Une facture rapporte la dépense annuelle de 400 taler rien que pour ce fruit. Le gage d’un artisan Prussien pour la même période s’élève à 20 taler.
Il consacrait aussi de nombreuses heures à lire, à composer de la musique et à écrire de la poésie. Il aimait être entouré de livres et toutes ses demeures comportaient de grandes bibliothèques.
Au fil des année il devint de plus en plus misanthrope, montrant plus d’affection pour ses chiens et pour son cheval que pour n’importe quel homme. Tous ses intimes se lassèrent de son caractère acariâtre et de ses critiques acerbes et finirent par l’abandonner.
Les artistes qui l’ont représenté en peinture avaient découvert le Photoshop avant que le mot n’existe. Même Adolph Menzel à qui l’on doit le tableau du roi jouant la flute, rectifie son nez alors que le masque de mort montre clairement un appendice nasal convexe à souhait.
Le musée comporte un petit théâtre où nous aboutissons à la fin du parcours de notre visite. Il est 12:45, une guide nous signale la possibilité d’assister à un concert de musique baroque qui débute à 13:00.
Le bouddha fait bien les choses, comme le dit M. lorsque le hasard nous sourit, nous acceptons l’invitation et la demi-heure de musique est le point d’orgue d’une très riche exposition dont je n’ai fait qu’effleurer la surface par les deux billets que je viens de rédiger.
À mes lecteurs je conseille de venir à Potsdam, Friederisiko est ouvert au public jusqu’au 28 octobre 2012.
Potsdam vaut le détour, vraiment. Nous l’avons visité un peu l’année dernière lors de notre petit séjour à Berlin.