Amélia, la jeune et belle fille du Comte tomba amoureuse de Jakob, un jeune homme de moindre rang. Ses parents lui interdirent sa fréquentation et devant son refus l’envoyèrent chez les Cisterciennes de Lindow où elle développa une connaissance des herbes médicinales et leurs pouvoirs de guérison.
Mais Jakob ne l’avait pas oublié et pendant de longues nuits il s’appliqua à gratter un trou dans le mur d’enceinte du couvent par où les amoureux prirent la fuite. On ne les jamais revus, ne reste d’Amelie qu’une plante médicinale qui porte son nom et dont on reconnait encore aujourd’hui les vertus bénéfiques.
Parfois le soir vers minuit, on entend encore des grattements le long des murs en ruine du cloître de Lindow.
Une statue en granit posée dans l’eau au sud du lac de Wutz, rappelle l’histoire.
La brochure de l’office du tourisme annonce qu’à l’instar de New York avec sa statue de la liberté et Copenhagen avec sa sirène, Lindow arbore fièrement son Amelie.
Ce matin, un peu après huit heures, nous avons largués le amarres du Chat Lune pour prendre la direction de l’écluse d’Altruppin.
L’éclusière est celle des feux verts d’Altfriesack. M. note dans le livre de bord que c’est devenue une copine, pendant la bassinée, ces dames bavardent et elles sont d’accord que le coût de la vie est nettement moins élevé en l’Allemagne qu’en Hollande, Suisse ou France, ce que je confirme.
Altruppin franchie, nous traversons pendant près de trois heures la réserve naturelle dite ‘La petite Suisse du pays de Ruppin’.
La nature est très belle mais la seule similitude avec la Suisse sont les collines boisées de forêts de pins, celui qui a donné cette qualification à la région, n’a jamais vu les Alpes.
La lumière est belle ce matin et un vent de force 4 à 5 chasse les nuages et nous offre un ciel changeant et spectaculaire.
Arrivé à Lindow, le ‘Hafenmeister’ du Sailing Club local et deux de ses amis nous aident à l’amarrage. Comme d’habitude ‘die Franzosen’ sont accueillis chaleureusement, nous nous émerveillions de la beauté de l’endroit et eux posent l’inévitable question politique, à laquelle nous donnons notre avis, en substance, il ne faut pas confondre les promesses électorales avec la réalité politique. François Hollande n’a pas fait la bise à Angela Merkel, mais c’est pas José Bové non plus, lui et son équipe sont suffisamment malins pour ne pas mener la France à des situations Grecques.
Lindow est la ville des trois lacs, à l’est, le ‘Gudelacksee’ que nous venons de traverser pour arriver ici, à l’ouest, le ‘Wutzsee’ où se trouve la statue d’Amelie et au sud-est le ‘Vielitzsee ». Hier Herr Glaser nous racontait hier que si la ‘Wende’ avait eu lieu un an plus tard, il aurait pu terminer le dragage de ce lac. Son entreprise avait obtenu un contrat pour le nettoyer et pour utiliser la boue comme fertilisant. À la chute du régime, son contrat fut annulé.
Après le lunch et une bonne sieste nous allons voir la statue d’Amelie et les murs en ruine du cloître cistercien. Le cimetière attenant est envahi de verdure, une tombe récente est couverte de fleurs, c’est probablement celle de la propriétaire du musée privé local qui vient de mourir soudainement à l’âge de soixante ans, comme nous l’a expliqué l’employée de l’office du tourisme, le musée est fermé.
Une autre curiosité de l’endroit est un jardin privé comportant des volières avec des perroquets, des perruches, des paons et des canards. Je n’aime pas les animaux encagés, les zoos et les volières me mettent mal à l’aise, dans mon rêve, j’ouvre les portes et je saccage les grillages.
Les moineaux qui voltigent en liberté s’en moquent et viennent picorer ici et là des graines tombées de l’une ou l’autre cage.
À la sortie, une urne invite les visiteurs à verser une obole pour aider le propriétaire à maintenir le lieu. Je ne donne rien, peut-être ouvrira-t-il un jour les cages, faute de moyens de les entretenir.
L’église est le dernier poste sur notre trajet exploratoire. Pour permettre aux croyants handicapés de pénétrer plus facilement dans le lieu saint sans avoir à franchir des escaliers, le prêtre a mis l’entrée principale au centre de la façade latérale. L’autre particularité de l’agencement est la position de la chaire contre le mur latéral en face de la nouvelle entrée, la photo ci-jointe est plus claire que mon explication.
La dame qui vend les images saintes à l’entrée nous explique qu’aujourd’hui c’est Herrentag. On s’en était rendu compte car nous avons croisé de nombreux mâles joyeux qui brandissaient une bouteille de bière entamée. Dans ce pays, l’ascension coïncide avec la fête des pères et par extension avec la fête de tous les hommes et cela ne passe pas inaperçu.
Ce soir nous mangeons des asperges de Belitz, ce sont les meilleures asperges que nous ayons jamais mangés. Je les fait cuire pendant une dizaine de minutes dans de l’eau dans laquelle j’ai fait bouillir préalablement leurs épluchures, question de renforcer leur goût.
Accompagnés de pommes de terre vapeur, d’un oeuf mi-dur, du beurre, de la rémoulade et du persil, on se régale à bord du Chat Lune.
Les asperges sont bonnes aussi avec une sauce hollandaise – presque comme une rémoulade chaude !
Vous avez raison, mais ce que je préfère est un oeuf dur mais pas trop, écrasé avec du beurre fondu, miam miam!
M