Tout à coup, c’est dans dix jours. Nous avons décidé de commencer notre croisière 2014 le mardi 29 avril. En effet, le samedi 26, le MET retransmet Cosi Fan Tutte au cinéma et nous avons des cartes pour aller voir et écouter Mozart; mardi suivant semblait un bon jour pour partir.
Il va falloir que je téléphone au service fluvial du district de la ‘Dender’, c’est ainsi que se nomme la Dendre côté Flamand. J’ai trouvé un site qui stipule qu’entre le 1octobre et le 30 avril, il est impératif de réserver le passage des ouvrages d’art de la rivière entre Dendermonde (Termonde) et Geraardsbergen (Grammond).
Un peu plus bas, au sud de Grammond on franchit la frontière linguistique, la Dender devient la Dendre et on tombe sous la ´Direction de la Promotion des Voies Navigables et de l’Intermodalité de Wallonie’.
Service auquel je dois également m’annoncer pour réserver notre passage des écluses et des ponts, dont deux escaliers de 6 écluses au sud d’Ath.
Ath est la ville où le ministre d’état Guy Spitaels fut bourgmestre. Socialiste, il fut président du parti, ministre dans plusieurs gouvernements, connu pour ses opinions fédéralistes, proche des syndicats, ses détracteurs et ses amis l’avaient surnommé ‘Dieu’.
C’est dans cette ville que je suis né, mais je n’en ai pas garde grand-chose, je ne suis ni croyant ni socialiste.
Quelques jours après ma naissance, je me suis retrouvé à Isières, village situé à 10 km d’Ath où j’ai passé ma prime jeunesse.
Si je cite ces deux lieux, c’est qu’ils sont traversés par la Dendre et c’est la raison qui me pousse à emprunter ce trajet pour nous rendre en France cette année-ci.
J’ai depuis longtemps envie de naviguer la rivière dont j’ai gardé un souvenir d’enfant.
Ma mère, une intrépide Suisse-Allemande, je raconterai peut-être un jour comment elle a abouti avec son nouveau-né, moi, dans ce patelin Wallon, poussait mon landau sur 7 km aller et 7 km retour, en longeant la rivière sur le chemin de halage, pour aller montrer son bébé au service de l’enfance à Lessines, petite ville également située sur la Dendre.
Le Chat Lune va vivre une croisière historico-nostalgique. Je me réjoui de voir se lever le Pont Hatot, le petit pont levis qui à Isières permet de franchir la Dendre. Il est situé sur le chemin de la Cavée qui mène à l’ancienne gare de chemin de fer du village.
Mais je digresse, comme indique le titre de la présente lettre, je voulais commenter les préparatifs de notre voyage en 2014.
Le 17 avril au petit matin, le Chat Lune quitte le hangar dans lequel il était entreposé depuis le mois d’octobre dernier.
Joe, le grutier du chantier Carron-Marine, positionne le bateau sous le bras de la grue mobile, je monte à bord et je l’aide à fixer au support en croix, les sangles qui vont le soulever et le déposer délicatement dans son élément naturel.
Tout se passe sans anicroches, une fois à l’eau, les sangles glissent sous la coque, le moulin démarre au quart de tour, un geste large d’adieu à Joe et à Diederich, le mécanicien qui a changé l’huile du moteur, de l’échangeur et remplacé les deux filtres à fuel et le filtre à huile et je fais le tour de la darse pour aller m’amarrer à un ponton du port de plaisance de Zelzate.
Je retrouve l’immense plaisir de la conduite de notre beau Linssen, tout en douceur, de la dunette on perçoit à peine le bruit du moteur, la barre est douce et le Chat ronronne et obéit sans rechigner à mes instructions.
Pour le trajet de Zelzate à Gand, j’ai invité mon neveu, sa femme et ses deux enfants au « Maiden trip 2014 ». Le soleil brille, parfois voilé par des Cirrus de haute altitude, un vent frais nous rappelle que nous sommes en début de printemps, les coupe-vent chauds sont de rigueur.
À 1,5 km à l’aval de l’ouvrage, j’appelle les écluses d’Evergem avec mon nouveau VHF, un ICOM M400 BB que j’ai acheté et installé en octobre dernier.
Le boîtier est caché dans une armoire technique et toutes les opérations se font à l’aide du micro qui comporte un large écran.
L’emploi est très intuitif, la combinaison des boutons de commande et des indications de l’écran coulent de source, pas besoin de consulter le mode d’emploi.
Le système de « noise cancellation » de l’appareil fonctionne à merveille, pour la première fois de ma vie de navigateur amateur, je comprend clairement et sans aucune difficulté tous les échanges entre l’éclusier et la dizaine de gros bateaux de commerces qui s’accumulent et se trouvent en attente de part et d’autre de l’ouvrage d’art.
Voilà un élément de sécurité et de confort que je recommande à tous mes amis nomades du fleuve.
L’éclusier m’indique que je peut prendre la première bassinée montante, en me calant à l’arrière du Serena, un bateau de 85 m qui se trouve amarré en premier devant les portes de l’écluse tribord.
Evergem comporte deux écluses mais aujourd’hui la nouvelle n’est pas opérationnelle et tout le trafic doit passer par le vieux bassin ce qui provoque des temps d’attente importants. Par le canal de mon nouvel investissement, j’entends que les derniers arrivés se voient attribuer la cinquième bassinée.
Les jeunes observent les manœuvres avec ravissement et intérêt, il est toujours impressionnant de se faufiler avec le Chat Lune entre les grands bâtiments. De manière générale, les mariniers sont sympathiques et prudents, les erreurs de manœuvres sont souvent dû à l’incompétence et au manque d’expérience des plaisanciers.
Vers 14:00 nous amarrons le Chat Lune à l’emplacement 76 que m’a attribué Ernest, le capitaine du port de Gent-Leie.
Suite du récit des préparatifs au prochain billet.