En tant que Belges, on se sent bien en France. On y parle le français et la mentalité n’est pas trop différente de chez nous. Comme chez nous, même en Flandre, quoi qu’en pensent nos politiciens, ‘l’à peu près’ règne. En règle générale, tout fonctionne, parfois de manière excellente comme la Poste, parfois de manière aléatoire comme l’entretien des voies navigables. Quand c’est cassé, on répare. Sauf bien entendu pendant le mois d’août, car du 31 juillet au 31 août, la France estive.
Depuis douze années, le Chat Lune et son équipage sillonnent ce beau pays, à l’exception du séjour passé à Berlin et dans le nord de l’Allemagne, de 2010 à 2012.
Nous sommes donc bien empreints de la culture et de la mentalité du pays et on s’y meut comme les poissons dans l’eau des rivières que nous parcourons.
Apach est le dernier village Français sur la Moselle. Une centaine de metres plus loin, après l’écluse du même nom, on traverse Schengen, le ‘Dreilandenpunkt’ où le traité de libre passage fut signé. Les plus jeunes ne s’en rendent pas compte, mais quel bonheur que de pouvoir passer d’un pays à l’autre sans avoir à montrer patte blanche et sans avoir à accomplir des formalités administratives plus ou moins laborieuses selon les cas.
N’empêche que les accords de Schengen n’ont pas effacé les différences culturelles, et la réalité les met en évidence.
Quatre kilomètres après Schengen, nous pénétrons dans la darse du port de plaisance de Swebesange.
Au VHF, je m’annonce à la capitainerie et j’exprime le souhait de faire le plein de carburant. Au Luxembourg, le fuel coûte 40 centimes de moins qu’en France, en Allemangne ou en Belgique.
J’amarre le Chat Lune à la pompe et le remplissage fait, je me rend au bureau pour payer le carburant et la nuitée.
Le capitaine du port me demande si je n’ai pas lu le panneau installé à l’entrée de la darse. La consigne est qu’il faut d’abord s’amarrer et ensuite contacter la capitainerie pour recevoir les instructions, et pas l’inverse. Le Luxembourg, ce n’est pas l’Allemangne, mais on n’en est pas loin et les consignes sont faites pour être respectée. Le panneau n’a pas été placé à l’entrée du port pour les canards.
Marleen et moi avons vécu quelques années en Allemagne, la culture nous est familière, aussi, immédiatement, dans notre cerveau, on change le registre. Schengen nous avait fait oublié qu’on avait quitté la France.
J’ai terminé mon dernier billet en promettant de parler de Metz. Voici.
Avant d’arriver à Metz, au niveau d’Ars-sur-Moselle, on aperçoit rive gauche, 7 arches d’un aqueduc Romain. Au musée de la Cour d’Or de Metz, dans la section ‘peinture du 18ieme siècle’, nous découvrons une oeuvre de Jean-Baptiste Claudot représentant ce que nous avons vu en naviguant. On adore ce genre de coïncidence, voir les photos ci-dessous.
Le musée est en partie établi au sein d’un édifice thermal datant du 2-ieme siècle après JC. Je ne cesse d’être émerveillé par la grandeur de la culture et par les connaissances technologiques romaines et sidéré par leur anéantissement.
Simple exemple, après la chute de l’empire Romain, il nous a fallu 17 siècles pour redécouvrir l’hydraulique nécessaire à nous procurer les plaisirs des bains chauffés et d’atteindre le niveau d’hygiène des patriciens. Ah, ce que ça devait puer à Versailles!
La collection des objets gallo-romains de Metz est une des plus riche du nord de la France.
Le musée est en trois partie, l’époque gallo-romaine, l’épique médiévale et les beaux-arts.
En juin, dans les couloirs du métro parisien, nous avions repéré une publicité pour l’exposition ‘Entre Deux Horizons’ au centre Pompidou de Metz. Il s’agit d’une rétrospective d’œuvres d’art moderne issues du Saarlandmuseum de Sarrebruck. Cent ans d’histoires partagées, d’influence croisées entre la France et l’Allemagne à travers 240 tableaux. Derain, Kirchner, Nolde, Léger, et Baumeister pour n’en citer que quelques-uns.
Le centre Pompidou nous offre également ‘Sublime, Les Tremblements du Monde’, un voyage au travers une série de catastrophes naturelles, éruptions volcaniques et autres tsunamis. Les catastrophes créés par l’homme, l’extinction de notre espèce, pour se terminer par des visons d’artistes sur des alternatives plus réjouissantes de notre avenir et celui de notre planète. Mes pensées vont aux Romains.
En chemin, dans la nef de l’église des Trinitaires, L’Habitant Temporaire nous intrigue. Le volume de cette lieu religieux abandonné se transforme en espace artistique et architectural. Dessins, croquis et photographies illustrent des ‘espaces domestiques’, les termes sont tirés de la brochure.
Enfin, le FRAC, Fonds Régional d’Art Contemporain de Lorraine, situé 1bis rue des Trinitaires, présente ‘Zones sensibles’, une série de créations autour du thème des cartes géographiques.
Je retiens l’idée intéressante d’un artiste allemand qui, d’une mappemonde, a méticuleusement découpé tous les pays, pour ensuite les coller au mur, par ordre alphabétique.
Je fais remarquer au jeune guide à l’entrée de l’exposition, que les mappemondes universellement utilisées, ne montrent pas les pays à leur dimension réelle. En effet, pour les créer, on utilise la projection dite de Mercator. Cette représentation déforme les aires.
Le guide répond qu’en effet, il avait remarqué cette anomalie, merci pour l’explication. Naviguer ça sert à quelque chose.
J’écris ce billet amarrés dans le port de Traben-Trarbach, l’eau a 23,4°C, on nage dans la Moselle.
La semaine prochaine, je commenterai la descente de la Moselle, de Metz à Coblence.