Einville n’est pas grand, mais comme son nom l’indique, ce n’est pas un village.
Sa darse nous offre un amarrage calme pour la nuit, nous n’en voulons pas plus.
Le canal de la Marne au Rhin continue à présenter son aspect ‘archéologie industrielle’. Pour faire face au traffic commercial intense du passé, certaines écluses ont été dédoublées. Aujourd’hui, une sur deux est à l’abandon et la nature a repris ses droits comme vous pouvez le constater sur la photos ci-dessus.
Mercredi, à 07:00, le Le Chat Lune largue ses amarrés du quai en herbe de Einville. Un peu plus loin, le Sindbad fait de même et nous faisons la route avec Rudi et Chris, un couple d’Allemands sympathiques et plein d’humour. Comme nous, ils ont une solide expérience de navigation et le franchissement des écluses avec nos deux bateaux en flottille, se fait comme une lettre à la poste.
Trois écluses avant Niderviller, on bavarde avec le patron d’une société de location de bateaux fluviaux, qui flânait le long du quai.
Il nous signale qu’il a cru comprendre que le plan incliné d’Arzviller venait d’être mis en chômage. L’information nous rend songeurs, c’est en effet la troisième fois que nous essayons de franchir cet ouvrage d’art.
En 2013 un accident l’avait immobilisé pendant plusieurs mois. Il s’est réouvert au traffic en mai 2014. L’événement est ponctué par une cérémonie officielle, fanfare, notables locaux, discours du maire de la ville. À l’époque, nous étions comme de coutume à Paris.
Confiants, nous décidons de remettre Arzviller sur notre itinéraire.
Quelques semaines plus tard, à Besançon sur le Doubs, nous apprenons que la structure de l’ouvrage présente des faiblesses structurelles et qu’il est refermé pour une durée indéterminée. Comme en 2013, nous faisons demi-tour et prenons un autre chemin.
Au printemps 2015, les réparations étant faites, l’ouvrage est réouvert pour la deuxième fois, sans fanfares cette fois-ci, pour ne pas provoquer le diable.
En 2016, nous décidons de ne pas lui donner des idées, au diable j’entend, et nous revenons au pays par la Moselle et le Rhin.
Cette année-ci, notre nature persévérante nous porte à refaire une tentative.
Aussi, l’information du patron de la société de location nous inquiète. Je téléphone à la VNF pour en savoir plus et j’apprend que, en effet, l’ouvrage est mis en chômage technique pour 48 heures.
Rassurés, nous amarrons le Chat Lune à Niderviller et nous nous mettons en mode d’attente.
Curieux de nature, nous découvrons que six kilomètre plus loin, dans la ville de Sarrebourg, se trouve la Chapelle des Cordeliers qui recèle un vitrail monumental de la main de Marc Chagall.
Ce n’est pas notre artiste préféré, on n’aime pas trop ses personnages, mais le vitrail de 12 m x 6 m, vaut l’effort du franchissement des collines et les 12 km sous un ciel de plomb. Nos Brompton, les meilleurs vélos pliables au monde, font merveille et nous sommes en bonne forme.
En prime, le Musée du Pays de Sarrebourg, situé à une encablure de la Chapelle, présente une exposition dédiée à des œuvres de Yvette Cauquil-Prince. Cette artiste Belge, a réalisé avec la complicité des artistes, des tapisseries tissées de grande dimensions, basées sur des œuvres de Chagall, Picasso, Ernst et Kandinsky. On peut également y admirer ses propres dessins, peintures et tapisseries. Cette découverte fait dire à Marleen que, Arzviller en panne, le Bouddha fait bien les choses.
Comme prévu, nous franchissons le plan incliné le jeudi matin, 20 juillet 2017.
Mis en service en 1969, l’ouvrage remplace 17 écluses, la dénivellation est de 45m.
Il est de la famille des ouvrages hydrauliques impressionnants, le plan incliné de Ronquières, l’ascenseur de Strépy-Thieu et l’ascenseur d’Anderton.
Nous approchons de Strasbourg. Plusieurs plaisanciers, rencontrés en chemin, nous avaient décrit les mérites du port fluvial de Souffelweyersheim, situé à 8 km au nord de Strasbourg.
Arrivés sur place, nous constatons que le port est plein et nous amarrons le bateau dans l’herbe. Le Sindbad continue sa route. J’ai envie d’essayer Souffelweyersheim, j’ai mis trois jours à mémoriser le nom du patelin, il faut qu’on y passe au moins la nuit.
À part l’excellent plat du jour au restaurant ‘Au Fil de l’Eau’ et la rencontre avec le propriétaire du Rêve de Satin, un bateau de plaisance français qui s’amarre près de nous et qui nous reconnaît, car il lit mes billets, nous ne voyons aucun intérêt à rester à Souffelweyersheim.
Aussi, le lendemain, le samedi 21 juillet nous franchissons les 8 km et les deux écluses qui nous séparent du port de plaisance de Strasbourg.
Le capitaine du port nous fait l’article de la ville et nous payons une semaine de séjour.