
Apollo m’appelle sur le canal 10. Il a entendu qu’un cadavre flotte dans le bief devant l’écluse de Guelzin, il y a un risque d’arrêt de navigation.
Au téléphone, l’éclusier de Guelzin me confirme l’arrêt de navigation. « Je n’en sais pas plus, mais ils sont tous là, la police, les pompiers et les plongeurs. » Il rajoute, « Aucune idée de la durée de l’interdiction, ils cherchent le cadavre, ça peut durer des heures, comme ça peut être fini pendant que je vous parle. »
Je consulte Marleen et nous décidons de rentrer à Gand par l’Escaut plutôt que par la Lys.
C’est également le chemin que prend Apollo, je lui signale en boutade, qu’il n’est pas encore débarrassé de notre présence.
C’est l’éclusier de Cléry-sur-Somme #12, sur le canal du Nord, après l’embranchement de la Somme qui nous a couplé avec le Freycinet Apollo. C’est un bateau de commerce chargé.
À bord il y a le marinier, son épouse, leurs deux petites filles, on est en période de vacances, et un Jack Russel blanc.
Le canal du Nord rejoint la vallée de l’Oise au canal Dunkerque-Escaut. Amorcé en 1913, sa construction fut interrompue par les deux guerres mondiales et ce n’est qu’en 1965 qu’il fut ouvert à la navigation.
D’une longueur de 95 km, il compte 19 écluses, deux biefs de partage et deux tunnels.
Le gabarit des écluses est de 91 m × 5,70 m.
Pour optimaliser le transport, les mariniers utilisent souvent des pousseurs, c’est-à-dire deux Freycinets de 39 m attachés ensemble en longueur, l’un derrière l’autre. Ce convoi solidaire remplit les bassins des écluses, il n’y a plus de place pour le Chat Lune.
Aussi, pour parcourir le canal du Nord, nous devons trouver un Freycinet seul ou une péniche de 60m, conçue pour ce canal.
L’Apollo était seul et c’est avec lui que nous avons franchi la moitié nord du canal du Nord.
Les écluses tournent de 06:30 à 22:30, les mariniers suivent ce rythme, nous aussi.
Par conséquent, nous avons fait le trajet de Paris à Gand en 5 jours.
Le trajet par l’Escaut est plus plaisant que par la Lys. C’est très nature, le fleuve serpente souvent entre des allées de hauts peupliers et trembles.
C’est un parcours ‘grands gabarits’, la chute des écluses est de 1,50m et elles tournent vite. Il y a du trafic, mais entre les géants du fleuve, le Chat Lune trouve toujours un amarrage.
Jeudi soir, notre quatrième jour de navigation depuis Paris, nous avons passé la nuit dans la halte de plaisance d’Antoing. C’est une darse sans facilités, l’endroit est calme.
À 100 m en aval, on découvre avec plaisir, une station de carburant Neptunia.
Nous faisons le plein de fuel. Attention, la station ferme à 18:00.
En face sur le quai, le supermarché Aldi ferme à 19:00.
Le café Le Scaldis au rond-point de la rue des Ponts sert de la Jupiler au tonneau bien fraîche.
Au comptoir, trois habitués un peu éméchés échangent des plaisanteries avec la patronne.
Antoing, c’est pas Paris.
Le lendemain vers 16:00, nous frappons nos amarres au quai du port de plaisance de Gent-Leie. Ernest, le sympathique capitaine du port, nous a réservé un emplacement.
Notre saison avec le Chat Lune se termine ici.
Trois mois et demi de vie à bord, six semaines au port de l’Arsenal à Paris et sept semaines de navigation.
Notre bateau attend l’hivernage chez Carron Marine. Je confie son entretien et les soins cosmétiques aux techniciens. En attente du printemps 2020, le Chat Lune passera l’hiver à sec dans le hangar du chantier.

À la mi-août nous partons vers le nord avec la Roulotte, notre mobile-home. Notre projet est de parcourir le sud de la Norvège.
Actuellement, à l’aise, nous préparons notre engin.
Je publierai un billet hebdomadaire.
PS. On passe et ils démolissent tout!
